J.O. 158 du 8 juillet 2005
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Observations du Conseil constitutionnel sur les échéances électorales de 2007
NOR : CSCX0508581S
Dans la perspective des élections présidentielle et législatives de 2007 - année qui verra en principe se succéder cinq élections - et compte tenu des évolutions de la législation intervenues depuis 2002, le Conseil constitutionnel formule les observations suivantes :
I. - Le remodelage des circonscriptions législatives
Le Conseil constitutionnel a observé, à propos des élections législatives de 2002, que la recherche de l'égalité rendait ce remodelage nécessaire.
En effet, le découpage actuel résulte de la loi n 86-1197 du 24 novembre 1986 relative à la délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés. Il repose sur les données du recensement général de 1982. Depuis lors, deux recensements généraux, intervenus en 1990 et 1999, ont mis en lumière des disparités de représentation peu compatibles avec les dispositions combinées de l'article 6 de la Déclaration de 1789 et des articles 3 et 24 de la Constitution.
Ces disparités ne peuvent que s'accroître avec le temps.
Il incombe donc au législateur de modifier ce découpage. Si cela n'est pas fait avant les prochaines élections législatives, ce qui serait regrettable, cela devra être entrepris au lendemain de celles-ci.
II. - Le calendrier des élections normalement prévues en 2007
Deux raisons justifient une modification de ce calendrier :
- une telle concentration de scrutins sollicite à l'excès le corps électoral au cours de la même période et fait peser sur les pouvoirs publics (notamment la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques) une charge trop lourde eu égard aux moyens matériels et surtout humains disponibles ;
- les élections locales auraient lieu en plein recueil des présentations, pour l'élection présidentielle, avec tous les risques que cela comporte tant pour la vérification de la validité des mandats que sur le nombre des candidats (deux générations de présentateurs pourraient être habilitées à parrainer).
Il convient donc de reporter les élections locales, ce qui pose nécessairement la question du report des élections sénatoriales.
III. - L'élection présidentielle
Les dispositions organiques de la loi de 1962 (modifiées pour la dernière fois en février 2001) devront être révisées avant avril 2006 (début de l'année couverte par le compte de campagne) pour un motif juridique : les renvois au code électoral qu'elles comportent ne sont plus à jour.
Les articles visés sont en effet ceux de 2001, alors qu'ils ont été parfois sensiblement modifiés depuis quatre ans, en particulier par l'ordonnance no 2003-1165 du 8 décembre 2003 portant simplifications administratives en matière électorale.
Cette réécriture indispensable de la loi de 1962 doit être mise à profit pour introduire les réformes qui s'imposent.
1. Le Conseil constitutionnel a déjà préconisé, dans ses observations publiques, les mesures suivantes :
- la diffusion de tous les présentateurs sur son site Internet ;
- le vote le samedi non seulement en Polynésie française, mais aussi dans les collectivités d'Amérique et centres de vote français d'Amérique ;
- l'anticipation du recueil des parrainages (qui devrait commencer dix jours plus tôt) et l'allongement corrélatif de la période allant de l'établissement de la liste des candidats jusqu'à la date du premier tour, période beaucoup trop restreinte aujourd'hui pour toutes les parties intervenantes, notamment le Conseil supérieur de l'audiovisuel ; cette mesure permettrait en outre de réduire la période au cours de laquelle il est fait appel à la notion incertaine de « pré-candidats », à laquelle s'applique le critère d'« équité » ;
- la capacité pour le Conseil constitutionnel, s'agissant de l'élection présidentielle comme des élections législatives, de moduler le remboursement des dépenses de campagne en fonction de la gravité des manquements et de tenir compte de la bonne foi du candidat, comme le code électoral en donne déjà la faculté au juge administratif pour les élections locales ;
- pour les deux élections, la fin de la possibilité donnée aux partis d'accorder des prêts avec intérêts ainsi que l'obligation d'être connu de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ;
- le transfert à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques de l'examen en première instance des comptes de campagne des candidats à l'élection présidentielle, le Conseil constitutionnel étant saisi par la Commission des rejets de compte ou, par les candidats eux-mêmes, des réformations diminuant le montant de leur remboursement ;
- la création d'un délit d'entrave à l'action des délégués du Conseil constitutionnel (tant pour la présidentielle que pour un référendum).
2. Le Conseil constitutionnel a également relevé que la législation en vigueur n'avait pas empêché en 2002 un nombre sans précédent de candidats. Une telle situation comporte des inconvénients tant pour la clarté et la sincérité des opérations électorales que pour l'organisation matérielle et le contrôle de ces opérations. Le Conseil s'interroge de nouveau sur le bien-fondé de règles de présentation dont le renforcement en 1976 (qui a porté de 100 à 500 le nombre des présentations requises) ne suffit plus à éviter la multiplication des candidatures. Si le législateur partageait ce sentiment, il lui appartiendrait de prendre les mesures appropriées.
IV. - L'ensemble des élections
Certaines des propositions faites par le Conseil constitutionnel dans le passé et intéressant l'ensemble des élections n'ont toujours pas été suivies d'effet. Il est souhaité qu'elles trouvent rapidement leur traduction dans le droit positif, étant souligné que les modifications de la loi ordinaire doivent précéder celles de la loi organique lorsque celle-ci y renvoie.
Sont ainsi préconisées les mesures suivantes :
1. La révision des causes d'inéligibilité.
2. En matière de campagnes électorales :
- la fusion du remboursement forfaitaire de droit commun et des remboursements spécifiques relatifs à l'affichage et aux professions de foi ;
- l'obligation pour le candidat d'éditer à compte d'auteur les ouvrages publiés en vue de son élection : le mandataire financier engagerait les dépenses d'édition de l'ouvrage et en encaisserait les recettes ; ces dépenses et ces recettes seraient imputées au compte de campagne pour leur montant brut ; la situation actuelle ne permet pas de respecter l'interdiction législative de financement par une personne morale ;
- l'abrogation ou l'adaptation de l'article L. 165 du code électoral qui interdit de façon irréaliste la distribution de tout imprimé autre que les professions de foi.
3. En matière d'opérations de vote :
- toute mesure évitant les bureaux de vote incomplets ou limitant les conséquences d'un faible effectif d'assesseurs ou de scrutateurs (application stricte des sanctions prévues en cas de mauvais vouloir des élus locaux, plage horaire réaliste, machines à voter...) ;
- des modalités de contrôle de l'identité des électeurs clarifiées à l'entrée du bureau de vote comme au moment de l'émargement (les articles L. 62 et R. 60 étant aujourd'hui diversement appliqués) ;
- l'interdiction explicite de manifester le sens de son vote dans le bureau de vote en ne prenant, par exemple, qu'un bulletin sur la table de décharge ;
- des bulletins de vote ne comportant que le nom du ou des candidats, de son ou de leurs éventuels suppléants, et, le cas échéant, celui du parti qui le ou les patronne et de son emblème.
Le président,
Pierre Mazeaud